LA PETITE HISTOIRE DES FACONS DE S’ASSOIR
AU JAPON
Oda Nobunaga 織田 信長(1534-1582)
Une autre façon de s’assoir concernant les
gens de haut rang est appelée « rakuza 楽座»,
également « omo-ashi 拝み足 » ou « kijinza貴人座 ». Les samurai ayant obtenu un titre officiel par
la cour impériale avaient la possibilité de s’assoir avec les jambes repliées
et les plantes de pieds jointes, dans le style des aristocrates siégeant à la
cour. Rakuza était réservé exclusivement aux hommes ayant eu ces honneurs.
Tokugawa Ieyasu 徳川家康
Sur les champs de bataille de
la période Sengoku戦国時代 (1477-1573), les rares représentations,
autres que les scènes de combat, montrent les samurai accroupis en sonkyô, en
tailleur (agura胡坐), ou avec un genou au sol (orishiki 折敷), leur
donnant la possibilité de se relever rapidement pour faire face à un ennemi. Les
positions seiza n’étaient absolument pas adaptées à l’extérieur ni au port de
l’armure.
Les généraux étaient assis plus
confortablement sur un siège pliant de campagne pour surveiller et commander
leurs troupes.
Orishiki
était utilisée par les guerriers, les corps de lanciers, les corps d’arquebusiers…etc.
pendant la période Sengoku comme position d'attente avant une attaque, ou lors
d’une prise d'armes. Loins des affrontements, les arquebusiers plaçaient leur
bras gauche sur leur genou gauche afin de fixer le canon de l'arme et de gagner
en précision. Des yaribusuma 槍衾, phalanges de lanciers assis en orishiki,
yari pointées vers l’avant et le haut constituaient un rempart de défense efficace
contre les ennemis.
Cette
position assise permettait aussi de se lever immédiatement et de se préparer à
attaquer sur un ordre soudain. Par ailleurs, elle était utilisée par les
sentinelles, qui lorsqu’elles s’endormaient, perdaient l’équilibre, ce qui les
ramenait à la vigilance.
« Kiza跪座 » à genou, en appui sur les orteils était un intermédiaire à la position agenouillé complétement.
Femmes et hommes utilisaient au domicile la position tate-hiza. Cette façon de s’assoir était commune et ne comportait pas de discrimination entre les sexes. La position à genou était très peu employée du fait de l’inconfort qu’elle pouvait représenter dans la durée, en particulier sur un sol en plancher.
Les façon moins conventionnelles de s’assoir pour les samurai au repos se
nommait « Anza 安座, assise
tranquille ».
Lorsque Tokugawa Ieyasu徳川家康instaura son pouvoir et la période Edo (1603-1868), une ère de paix s’en suivit. Les représentations officielles des personnages de haut rang sont toujours en position assise en tailleur, mais les positions à genou commencent à se populariser. Le port du sabre se relativise et sa pratique se développe essentiellement dans les dojo. Le kenjutsu devient secondaire et les écoles existantes développent un usage du bokken et plus tard du shinai. Le batto-jutsu抜刀術 (ancienne appellation du iai) devient un budo courant.
Le port du wakizashi en intérieur apporte des techniques nouvelles à partir de l’assise en tate-hiza, le genou droit levé afin de ne pas gêner le maniement du sabre, permettant de dégainer la lame sans difficultés et de couper dans un même mouvement.
Alors d’où provient cette
position seiza dans la pratique du sabre, alors qu’elle n’était pas naturelle
pour les japonais des époques ancestrales ?
S’assoir à genou résulte sans doute sous l’influence de la
cérémonie du thé qui a imprégnée fortement le mode de vie du début de la
période Edo. Les minuscules maisons de thé se développant dans la haute société
ne permettaient pas une assise autre qu’à genou et encore moins avec un sabre.
Le seul fait d’entrer par le Nijiri-guchi躍口, minuscule porte, ne pouvait se faire qu’à
genou.
La symbolique de cette position
comportait une dimension pacifique. C’est par la suite devenu la façon officielle
de s’assoir en présence du shôgun, dans une marque d’obéissance. Cette position
connue
sous le nom de « Kusshitsu-za-hō屈膝座法 , méthode
d’assise les genoux pliés »est devenue « seiza正座, l’assise correcte ».
L’histoire rapporte que le seiza
s’est établie dans la classe samurai à partir du 3ème shôgun,
Tokugawa Iemitsu徳川家光 (1604-1651) suite à une
audience cérémonielle au château d’Edo. Elle fut imposée formellement sous le 8ème
shôgun Tokugawa Yoshimune徳川吉宗
(1684-1751), en signe d’obéissance. (cf. « Recherches sur les rituels des samurai médiévaux » de l’historien
japonais Futaki Kenichi 二木謙一, de l'Université Kokugakuin).
Dans la vie quotidienne, il
était fort probable que les personnes adoptaient des postures plus
confortables, le plus souvent les jambes croisées, même si les tatami
apportaient une plus grande commodité après le milieu de la période Edo.
La généralisation du tatami à
partir de la fin du 19ème siècle a popularisé le seiza chez les gens
du peuple, position difficile sur un parquet.
Concernant le iaido, il était à l’origine travaillé debout, destiné à une pratique extérieure. Au milieu de la période Muromachi, des écoles dispensent un enseignement du iai à partir d’une position intermédiaire à tate-hiza, en appui sur les orteils du pied gauche, orishiki 折敷. Ce n’est que vers le milieu de la période Edo que des techniques en seiza apparaissent. Pour la plupart, les actions s’enchaînent au sol.
De posture de soumission, seiza
a pris une connotation de non-agression conférant aux budo leur dimension
pacifique. Il est dit qu’avoir une posture droite améliore la circulation
sanguine vers le cerveau améliorant la concentration et la présence.
En référence au bouddhisme zen, un certain nombre de maîtres disent que la
position assise est devenue optimale chez les budoka, parmi les Gyojuzaga 行住坐臥, les quatre postures du quotidien, « en marchant, debout, assis et
couché », dans lesquelles il est
souhaitable de se concentrer uniquement sur une action pour prendre conscience de
l’instant présent.










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